NATURE JURIDIQUE DES CRÉDITS CARBONE VOLONTAIRES

ÉTUDE LXXXVI – Nature juridique des crédits carbone volontaires

Le concept de crédit carbone a été introduit dans le Protocole de Kyoto de 1997 dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère. Depuis cette date, un certain nombre de traités internationaux et de lois nationales ont introduit des règlements connexes visant à lutter contre le réchauffement climatique. Une référence particulière est faite à l’Accord de Paris de 2015, qui prévoit le commerce du carbone comme un moyen essentiel de réduire les émissions de carbone à l’échelle mondiale.

Des instruments tels que le Protocole de Kyoto et l’Accord de Paris ont encouragé le développement d’un marché international pour la création et l’échange de certificats carbone. Parallèlement au développement des marchés contraignants du carbone, la demande de crédits carbone de la part d’entités qui ne sont pas tenues de participer obligatoirement aux marchés du carbone a également augmenté. Les crédits carbone volontaires (“CCV”) représentent une certification indiquant que le détenteur, directement ou indirectement, a réduit ou éliminé de l’atmosphère l’équivalent d’une tonne métrique de dioxyde de carbone conformément aux règles et exigences applicables. Les CCV sont généralement constitués en dehors de tout cadre réglementaire ou de conformité et sont généralement choisis par les parties prenantes concernées comme moyen de compenser leurs émissions et les aider à atteindre leurs objectifs de zéro émission nette.

Les investissements et les transactions concernant ce type d’actif complexe requièrent une sécurité juridique qui ne peut être considérée comme acquise sur des marchés non réglementés et non supervisés. Alors que les marchés volontaires du carbone gagnent en taille et en complexité, les échanges de CCV seraient considérablement accru si des mesures étaient prises, tant au niveau national qu’international, pour mieux comprendre la nature juridique des CCV.

Le principal objectif du projet d’UNIDROIT sur la nature juridique des crédits carbone volontaires (le “projet CCV” ou “projet”) est donc de fournir des orientations sur les questions de droit privé afin de renforcer la confiance dans les transactions de CCV et de soutenir le développement d’un marché qui fonctionne bien et qui pourrait jouer un rôle central dans la lutte contre le changement climatique, la réalisation des objectifs de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (“CCNUCC”), en particulier l’Accord de Paris, et faciliter la réalisation des Objectifs de développement durable de l’ONU. Étant donné qu’une partie importante des projets qui génèrent des CVV sont situés dans des économies en développement, un marché des crédits carbone fiable offre également la possibilité d’augmenter les flux de capitaux vers les marchés émergents et de fournir un financement à des projets qui, autrement, pourraient ne pas recevoir un soutien adéquat.

Le 24 janvier 2022, l’International Swaps and Derivatives Association (“ISDA”) a soumis une proposition à UNIDROIT recommandant l’Institut d’envisager un projet visant à analyser la nature juridique des CCV. La proposition de l’ISDA a été expressément soutenue par le Gouvernement du Paraguay dans une lettre reçue par le Secrétariat d’ UNIDROIT le 9 mai 2022.

Lors de sa 101ème session (Rome, 8-10 juin 2022), le Conseil de Direction d’UNIDROIT a recommandé à l’unanimité l’inclusion du projet CCV dans le Programme de travail 2023-2025, avec une priorité élevée (voir paras. 50-60, UNIDROIT 2022 – C.D. (101) 4). Bien que le Conseil de Direction ait reconnu les similarités du projet CCV avec le projet d’UNIDROIT sur les actifs numériques et le droit privé (le “Projet ANDP”), il a identifié suffisamment de caractéristiques distinctes des CCV pour recommander qu’un Groupe de travail séparé soit établi pour le projet CCV. La recommandation du Conseil de Direction a été approuvée à l’unanimité par l’Assemblée Générale d’UNIDROIT lors de sa 81ème session (Rome, 15 décembre 2022) (voir paras. 75-78, UNIDROIT 2022 – A.G. (81) 3).

Suite à la réception du mandat, le Secrétariat d’UNIDROIT a organisé un premier Atelier consultatif exploratoire (le “premier Atelier exploratoire”) en collaboration avec le Groupe de la Banque mondiale et l’ISDA, qui s’est tenu au siège de l’ISDA à Londres le 27 mars 2023. L’objectif du premier Atelier exploratoire était d’identifier les questions actuelles dans le domaine du CCV et de délimiter le champ d’application du projet. Un document de discussion préliminaire a été préparé par le Secrétariat pour guider la discussion. Le premier Atelier exploratoire a réuni vingt-quatre participants, y compris des représentants d’organisations internationales, de l’industrie et du monde universitaire, ainsi que des praticiens et des membres du Secrétariat d’UNIDROIT. Le premier Atelier exploratoire a examiné, entre autres, les questions suivantes:

a)            Concepts clés;

b)            Considérations clés relatives à la nature juridique des CCV;

c)            Propriété, création et transférabilité des CCV;

d)            Opérations garanties impliquant des CCV, y compris la collatéralisation;

e)            Dépositaires/intermédiaires;

f)            Questions relatives au droit applicable;

g)            Traitement en cas d’insolvabilité; et

h)            Surveillance réglementaire du marché local.

Une mise à jour de l’état d’avancement du projet sur les CCV, s’appuyant sur les conclusions du premier Atelier exploratoire ainsi que sur les propres recherches du Secrétariat, a été présenté au Conseil de Direction d’UNIDROIT lors de sa 102ème session (Rome, 10-12 mai 2023). À cette occasion, le Conseil de Direction a confirmé l’autorisation d’établir un Groupe de travail, en collaboration avec le Groupe de la Banque mondiale, chargé d’élaborer un instrument de droit international pour fournir des orientations sur la nature juridique et d’autres aspects de droit privé des CCV (le “Groupe de travail sur les CCV”).

Un deuxième Atelier consultatif exploratoire s’est tenu dans les bureaux du Groupe de la Banque mondiale à Vienne le 11 juillet 2023 (le “deuxième Atelier exploratoire”). Le deuxième Atelier exploratoire a réuni vingt-huit participants, dont des experts d’organisations internationales, de banques de développement, d’universités et du secteur privé, ainsi que des représentants du Secrétariat d’UNIDROIT. Le deuxième Atelier exploratoire s’est appuyé sur les travaux du premier Atelier exploratoire et a examiné, entre autres, les points suivants:

a)            Concepts clés;

b)            Principaux acteurs impliqués dans le cycle de vie des CCV;

c)            Considérations clés concernant la nature juridique des CCV;

d)            Propriété des CCV;

e)            Transférabilité des CCV;

f)            Transactions garanties et collatéralisation des VCC;

(g)          Retrait des crédits carbone;

(h)          Prix des CCV;

(i)            Comptabilisation des CCV;

(j)            Traitement en cas d’insolvabilité;

(k)            Surveillance par les régulateurs des marchés locaux;

(l)            Questions relatives au droit applicable;

(m)          Crédits carbone sectoriels; et

(n)           Questions pertinentes ne devant pas être incluses dans le champ d’application du projet.

Le deuxième Atelier exploratoire a été clôturé par les participants qui ont noté que les prochaines étapes seraient définies en coordination avec les organisations sœurs d’UNIDROIT, y compris avec le Secrétariat de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) à la lumière de la 56ème session de la Commission de la CNUDCI qui s’est tenue à Vienne du 3 au 21 juillet 2023, et avec la Conférence de La Haye de droit international privé (“HCCH”).

Conformément à la méthodologie de travail établie par l’Institut, un Groupe de travail a été créé, composé de membres sélectionnés pour leur expertise dans les domaines de l’échange de crédits carbone, du droit de l’environnement, du droit de la propriété, du droit des contrats, des opérations garanties et de la technologie numérique. Les experts participent à titre personnel et représentent différents systèmes juridiques et régions géographiques. Le projet est réalisé avec le soutien du Groupe de la Banque mondiale et, à ce stade, les travaux sont menés en coopération avec la CNUDCI.  Des représentants du Groupe de la Banque mondiale et de la CNUDCI, ainsi que des experts nommés par la CNUDCI, ont donc participé à la première session du Groupe de travail.

 

Le Groupe de travail est actuellement composé des experts suivants:

    • Filippo Annunziata, Professeur de droit des marchés financiers et de droit bancaire, Université Bocconi Milano (Italie)
    • Ipshita Chaturvedi, Associée, Dentons Rodyk (Singapour) (désignée par la CNUDCI)
    • Géraud de Lassus St-Geniès, Professeur de droit, Université Laval (Canada) (désigné par la CNUDCI)
    • Luca Enriques, Professeur de droit des sociétés, Université d’Oxford (Royaume-Uni/Italie)
    • Megumi Hara, Professeure de droit, Université Chuo (Japon)
    • Caroline Kleiner, Professeure de droit, Université Paris Cité (France)
    • Matthias Lehmann, Professeur de droit privé, Université de Vienne (Autriche)
    • Ludovino Lopes, Associé fondateur, Ludovino Lopes Sociedade de Advogados (Brésil/Portugal)
    • Kelvin Low, Professeur de droit privé, Université nationale de Singapour (Singapour)
    • Andrea Tosato, Professeur associé de droit commercial, Université de Nottingham (Royaume-Uni) et Professeur associé en droit (visiteur), Université de Pennsylvanie (États-Unis d’Amérique)
    • Rolf H. Weber, Professeur, Université de Zurich (Suisse)
    • Zhang Xiaoping, Professeur associé de droit, Central University of Finance and Economics (République populaire de Chine) (désigné par la CNUDCI)

En outre, des organisations internationales, intergouvernementales et non gouvernementales, ainsi que des universitaires et des représentants du secteur privé ont été invités à assister aux sessions du Groupe de travail en tant qu’observateurs. La participation de ces organisations et parties prenantes garantira la prise en compte de différents points de vue dans l’élaboration et l’adoption de tout instrument international futur.

 

Les organisations ci-dessous ont rejoint le Groupe de travail en tant qu’observateurs institutionnels:

    • Conférence de La Haye de droit international privé (HCCH)
    • Association Internationale des Swaps et Dérivés (ISDA)
    • Association internationale pour l’échange de quotas d’émission (IETA)
    • Banque asiatique de développement (BAD)
    • Banque interaméricaine de développement (BID)
    • Bourse de Thaïlande
    • Centre Frank J. Guarini sur le droit de l’environnement, de l’énergie et de l’aménagement du territoire à la faculté de droit de l’université de New York
    • Commission nigériane des valeurs mobilières et des changes
    • Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) (nommée par la CNUDCI)
    • Fonds de défense de l’environnement (EDF)
    • Forum financier Asie-Pacifique (APFF)
    • Institut de droit européen (ELI)
    • Institut de droit international (ILI)
    • Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV)
    • TOSCA Research Group, Centre for Responsible Digitalisation
    • West African Alliance on Carbon Markets and Climate Finance (Alliance ouest-africaine sur les marchés du carbone et le financement du climat)

 

Les personnes suivantes ont rejoint le Groupe de travail en tant qu’observateurs, à titre personnel:

    • Dessanin Ewèdew Thierry Awesso, Attaché d’enseignement, Université Côte d’Azur (France/Togo)
    • Malik R. Dahlan, Professeur émérite de droit international et politiques publiques, Université Queen Mary de Londres (Royaume-Uni)
    • Blanca López Bassa, Directrice juridique, Paskay (Pérou)
    • Marisa Martin, Pollination (États-Unis d’Amérique)
    • Gabriela Melgarejo, Chercheuse, Centro de Educación de Derecho, Economía y Política (CEDEP) (Paraguay)
    • Jason Norman Lee, Directeur Général, Legal & Regulatory, Temasek International Pte. Ltd (Singapour)
    • Cameron Prell, Directeur Général, The dCarbon Group (États-Unis d’Amérique)
    • Rodrigo Jesús Rodrígues Tornquist, Professeur, Universidad Nacional de San Martín (Argentine)
    • Munkh-Orgil Tseng, Membre du Grand Khoural (Parlement) (Mongolie)
    • Ingrid York, Associée, White & Case LLP (Royaume-Uni)
    • Peter Zaman, Associé, Holman Fenwick Willan LLP (Singapour)

José Antonio Moreno Rodriguez, Membre du Conseil de Direction d’UNIDROIT, ainsi que Suzanne Howarth et Antenor Madruga, Correspondants d’UNIDROIT pour l’Australie et le Brésil respectivement, participent au Groupe de travail en tant qu’observateurs.  La Professeure Louise Gullifer (Université de Cambridge) agit en tant que Conseiller principal auprès du Secrétariat d’UNIDROIT pour ce projet.

La composition du Groupe de travail est encore ouverte et d’autres membres et observateurs pourront être ajoutés en temps voulu.

 

Première session du Groupe de travail

La première session du Groupe de travail sur la nature juridique des crédits carbone volontaires s’est tenue au siège d’UNIDROIT à Rome du 10 au 12 octobre 2023. Les documents suivants sont disponibles en anglais seulement:

 

Deuxième session du Groupe de travail

La deuxième session du Groupe de travail sur la nature juridique des crédits carbone volontaires se tiendra au siège d’UNIDROIT à Rome du 22 au 24 avril 2024. Les documents suivants sont disponibles en anglais seulement: